Mega Menu

Déclaration du FOCODE sur les accusations mensongères du porte-parole de la police

·

·

DECLARATION DU FOCODE n°027/2017  du 03 octobre 2017

« La police burundaise doit cesser la criminalisation et la stigmatisation des défenseurs de droits humains engagés dans la documentation des violations graves de droits humains. » 

Réaction du FOCODE aux accusations mensongères de M. Pierre NKURIKIYE contre les présidents du FOCODE et de l’APRODH

Le Forum pour la Conscience et le Développement, FOCODE en sigle, organisation burundaise engagée dans la documentation des cas de disparitions forcées et d’autres crimes graves au Burundi, a accueilli avec beaucoup d’étonnement les propos tenus par Monsieur Pierre NKURIKIYE, porte-parole de la police burundaise, sur des radios burundaises ce lundi 02 octobre 2017[1]. Alors qu’il présentait aux medias un présumé assassin de Madame Noella MASABARAKIZA dont le cadavre a été découvert le 18 août 2017 dans la rivière Jiji en province de Bururi, M. NKURIKIYE s’en est violemment pris à M. Pacifique NININAHAZWE, président du FOCODE, et à M. Pierre-Claver MBONIMPA, président de l’APRODH, une autre organisation burundaise de droits humains. Dans sa déclaration, M. NKURIKIYE a porté des accusations extrêmement graves et mensongères contre le Président du FOCODE dont les plus importantes sont les suivantes :

  1. Etre le « plus grand criminel du Burundi » (« Inkozi y’ikibi isumba izindi»),
  2. Avoir falsifié et publié sur les réseaux sociaux une fausse identité de Madame Noëlla MASABARAKIZA dans l’intention de fausser l’enquête de la police sur cet assassinat,
  3. Avoir détourné, en collaboration avec Pierre-Claver MBONIMPA, l’enquête de la police sur la disparition de l’Honorable Oscar NTASANO ;
  4. Avoir « brûlé des gens dans les rues de Bujumbura» (guturira abantu mu mabarabara ya Bujumbura) durant les manifestations de 2015 et en vouloir à la police nationale qui l’a empêché de « continuer à brûler des gens dans les rues » ;
  5. Publier fréquemment de fausses informations pour détourner la vérité sur des crimes (notamment de disparitions forcées) dont il est l’auteur ;
  6. Avoir publié de fausses alertes sur la disparition de deux femmes burundaises le weekend dernier ;
  7. Résider dans des « pays des blancs » qui lui ont donné la mission de ces crimes

A. Prise de position du FOCODE sur ces graves accusations

Face aux graves accusations tenues ce 02 octobre 2017 par M. Pierre NKURIKIYE, porte-parole de la police burundaise, contre M. Pacifique NININAHAZWE, le FOCODE tient à déclarer ce qui suit :

  1. Le FOCODE s’étonne que la police burundaise se permette de qualifier les défenseurs de droits humains de « plus grand criminel », sans aucune enquête et avant la condamnation par une juridiction compétente ;
  2. Le FOCODE dément les propos mensongers sur la falsification de l’identité de Madame Noëlla MASABARAKIZA et précise que le président du FOCODE n’a fait aucune publication sur l’assassinat de Madame Noëlla MASABARAKIZA. Le FOCODE mène encore son enquête sur cet assassinat et ses résultats seront publiés dans les prochains jours. Le FOCODE met au défi la police burundaise de montrer une seule publication de M. Pacifique NININAHAZWE sur ce cas ;
  3. Le Président du FOCODE a partagé publiquement des informations sur la disparition forcée de l’Honorable Oscar NTASANO, posé des questions au porte-parole de la police, notamment sur le sort du cadavre de Lambert BITANGIMANA présenté par M. NKURIKIYE comme l’auteur de l’enlèvement de M.NTASANO et relevé des incohérences dans les déclarations de la police et de la justice. L’objectif du FOCODE est de contribuer dans l’éclatement de la vérité sur ce dossier. Le FOCODE publiera prochainement l’intégralité de son enquête sur la disparition forcée de l’Honorable Oscar NTASANA et la partagera également à la police burundaise ;
  4. Le FOCODE s’étonne que la police parle des « gens brûlés » dans les rues de Bujumbura par M. Pacifique NININAHAZWE sans donner les noms des victimes, les dates et les lieux de la survenance de ces actes ignobles. Le FOCODE a été mis au courant de l’unique cas du lynchage d’un membre de la jeunesse Imbonerakure, Léonidas MISAGO, le 07 mai 2015 à Nyakabiga et M. Pacifique NININAHAZWE, qui ne pouvait être sur les lieux à cause des menaces des services secrets burundais, a condamné dans les mots les plus durs cet acte ignoble[2];
  5. Le FOCODE demande à la police burundaise de rendre publics tous les dossiers dans lesquels M. Pacifique NININAHAZWE a essayé de détourner la vérité sur des crimes dans lesquels il serait impliqué. A ce jour, le FOCODE a publié ses résultats d’enquête sur une quarantaine de dossiers de disparitions forcées et d’assassinats. Tous ces dossiers sont publiés dans le cadre de la « Campagne NDONDEZA contre les disparitions forcées au Burundi » et sont disponibles sur le site web ndondeza.org Le FOCODE est rarement au courant des enquêtes de la police qui seraient en cours sur la plupart de ces dossiers et estime que les informations publiées sont des pistes qui peuvent intéresser les enquêteurs ;
  6. Sur demande des amis et des proches des intéressées, le Président du FOCODE a publié le week-end dernier des alertes sur l’arrestation de deux femmes burundaises à la frontière rwando-burundaise, Mesdames Christella UWINEZA et Evelyne NIYONZIMA. Le FOCODE se réjouit que les alertes se soient révélées fausses selon le porte-parole de la police et souhaiterait que toutes les alertes sur des cas de disparitions soient fausses. Le système d’alerte rapide via des réseaux sociaux a sauvé beaucoup de burundais qui en ont même témoigné, malheureusement beaucoup d’autres citoyens sont introuvables après des alertes sur leur arrestation ou enlèvement par des éléments de la police burundaise et cette dernière reste muette sur ces cas. Le FOCODE continuera à alerter chaque fois que des familles exprimeront des craintes qu’un des leurs est en danger et lui demanderont de le faire, c’est plutôt à la police de vérifier rapidement ces alertes et de sauver des citoyens probablement en danger ;
  7. Le FOCODE s’indigne des propos de M. Pierre NKURIKIYE arguant que M. Pacifique NININAHAZWE résiderait dans les « pays des blancs » qui l’auraient mandaté à commettre des crimes. La police serait digne en précisant ce genre de propos. Le Président du FOCODE se trouve en exil, comme près de cinq cent mille autres citoyens, parce que sa vie est en danger au Burundi sa patrie ;
  8. Les propos de M. NKURIKIYE accusent gratuitement des « pays de blancs » sans les préciser. De telles accusations gratuites et délibérées, tenues par le porte-parole d’une institution comme la police nationale, ne font que l’enfoncer dans une perte grave de crédibilité. Le FOCODE condamne l’extravagance et la légèreté avec lesquelles la police burundaise se permet de porter des accusations aussi graves sans la moindre précision, sans un minimum d’enquête et dans un langage indécent, contre des pays et des défenseurs de droits humains ;
  9. Le FOCODE se félicite que la police reconnait qu’elle lit les rapports du FOCODE, qu’elle ait pensé pour une fois à répondre à son alerte et demande une réponse à la quarantaine de dossiers NDONDEZA déjà publiés.
  10. Le FOCODE encourage la police et les autorités burundaises à collaborer davantage avec la Commission d’enquête des Nations-Unies et la Cour Pénale Internationale et de transmettre toutes les allégations sur l’implication de MM. Pacifique NININAHAZWE et Pierre-Claver MBONIMPA dans les crimes graves en cours au Burundi depuis avril 2015 ;
  11. Le FOCODE demande enfin son droit de réponse, pour un temps égal, aux media publics qui ont accepté de diffuser les accusations aussi graves contre M. Pacifique NININAHAZWE.

 

Pour le FOCODE,

Sé Denis NDAYISHEMEZA
Vice-président

 

B. Complément d’informations

1°. Sur les deux alertes du week-end dernier

Un avocat burundais, Maitre David DUSABE, vient d’annoncer qu’il a été contacté, via le numéro de l’une des prétendues victimes, par une personne qui assurait être le chauffeur du bus de transport à bord duquel se serait trouvée la victime. Maitre DUSABR est l’une des sources qui ont alerté le FOCODE en plus de certains membres des familles personnes déclarées comme arrêtées à la frontière burundo-rwandaise. Témoignage de Maitre David DUSABE :

« Salut Chers tous. Ce vendredi, j’ai été alerté sur le cas de la pseudo arrestation de Madame Christella Uwineza que je connaissais très bien. J’ai été appelé par le numéro de Christella et mon étonnement était que la voix était d’un homme qui se présentait comme un chauffeur du bus qui transportait Christella vers la frontière burundo-rwandaise. Le prétendu chauffeur m’a informé que Christella venait d’être arrêtée et qu’il m’alertait parce que mon numéro était dans le répertoire de Christelle. Puis le téléphone a été éteint. J’ai vite informé des défenseurs de droits humains dont Pacifique Nininahazwe et Adrien Rugambarara pour qu’ils volent au secours d’une vie en danger. J’ai été étonné dimanche quand Christella m’a parlé elle-même sur un numéro rwandais et me demandait d’arrêter l’alerte qui risquait de la mettre en danger. Mon plus grand étonnement est arrivé ce lundi matin quand un compte Twitter du SNR, Burundi Bwiza, a annoncé que Christella était plutôt hospitalisée. Le tweet a été rapidement retwitté par Willy Nyamitwe plus connu dans ce genre de montages grotesques. »[3]

2°. Sur des « gens brûlés » dans les rues de Bujumbura

Les autorités burundaises aiment utiliser ce langage d’exagération pour ternir l’image des manifestations citoyennes et pacifiques contre le troisième mandat de Pierre NKURUNZIZA. Un membre de la jeunesse Imbonerakure, Léonidas MISAGO, a été tué et brûlé à Nyakabiga le 07 mai 2015. Aucune enquête crédible (pas même celle de la police) n’a été menée pour déterminer dans quelles circonstances Léonidas MISAGO se serait retrouvé à Nyakabiga, dans quelles circonstances il a été reconnu comme un Imbonerakure, qui a décidé son lynchage et  sur les raisons qui ont empêché aux éléments des services de sécurité d’intervenir pour le sauver alors qu’ils n’étaient pas loin des lieux. Pour la première et dernière fois, des membres du gouvernement se sont présentés sur les lieux alors que de nombreux manifestants ont été tués dans plusieurs quartiers et localités du pays dans le silence et l’indifférence totales des autorités burundaises. Sur ce cas comme sur de nombreux autres, il est impensable que la police se permette de condamner sans avoir mené une enquête.

Le Président du FOCODE, qui assurait en même temps la vice-présidence du Mouvement Halte au Troisième Mandat de Pierre Nkurunziza, a clairement et fermement condamné cet acte ignoble dans les termes ci-après[4] :

#Burundi Je suis choqué et attristé par la nouvelle d’un jeune citoyen brûlé vif à Nyakabiga. J’implore les manifestants contre le troisième mandat d’éviter, autant que faire se peut, de céder aux horribles provocations du pouvoir. Je ne peux pas m’imaginer que notre semblable ait pu brûler jusqu’à sa mort et que personne n’ait pu l’aider. Le jour où la souffrance d’autrui nous semblera normale, le jour où la mise à mort d’une personne nous semblera bénigne, ce sera le jour de notre défaite. Nous devons éviter à tout prix de ressembler au mal que nous combattons.

Je voudrais aussi exprimer toute ma solidarité aux manifestants qui subissent chaque jour des provocations horribles par des imbonerakure soutenus par l’administration et la police. Hier, à Kanyosha, des grenades ont été lancées sur des manifestants, des balles réelles ont été tirées sur nos manifestants. Le groupe des attaquants imbonerakure comprenait, selon les manifestants, l’administrateur communal de kanyosha Abdou Bampoye. Ce matin, des manifestants de Cibitoke ont été gravement blessés par des imbonerakure de Kinama accompagnés de policiers. Des enfants, des citoyens ont été tués à bout portant, par la police, les mains en l’air. Certains manifestants arrêtés ont été horriblement torturés en présence du directeur général adjoint de la police. Ces injustices vont progressivement créer une situation ingérable sur terrain.

Des questions peuvent être posées après l’incident de Nyakabiga. Les jeunes attaqués auraient été amenés et cachés par le fameux Kazungu du SNR. Quelqu’un a averti certains manifestants. La suite est connue. L’armée et la police n’ont pas intervenu. Puis Édouard Nduwimana et trois autres ministres visitent les lieux; des ministres qui ne s’étaient jamais déplacés dans d’autres cas. Cela sent le coup monté.

La coordination de la Campagne Halte au Troisième Mandat exprime sa solidarité avec la famille éprouvée et s’associera à elle dans les funérailles.

3°. Sur les dossiers NDONDEZA

Le FOCODE a enquêté sur une quarantaine de cas de personnes disparues ou des victimes d’autres crimes graves. La plupart de ces dossiers ont été publiés sur le site web de la « Campagne NDONDEZA ». La police burundaise ne s’est jamais exprimée sur ces cas alors qu’elle devrait enquêter le plus rapidement possible. Le FOCODE rappelle ici tous ces dossiers qui attendent la réponse de la police et des autorités burundaises :

[1] Propos de Pierre Nkurikiye en Kirundi : https://soundcloud.com/burundi-burundi/declarations-pnb

[2] https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=1426360897682352&id=100009253659534

[3] David DUSABE sur Facebook : https://www.facebook.com/david.dusabe/posts/1459448784109795

[4] Pacifique NININAHAZWE sur Facebook : https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=1426360897682352&id=100009253659534


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *